IV. Les Montures :
4.1 Généralités sur les montures :
Il existe plusieurs types de montures pour les sabres japonais . Il faut entendre ici montures dans son acceptation globale , c'est-à-dire plus dans sa forme représentative générale que par ses articles de montage et autres décorations .
Nous nous intéresserons d'abord et surtout en détail , à la monture relative aux sabres japonais représentatifs du NIHONTO et du NIPPONTO d'un point de vue moderne .
A savoir les sabres formant le " DAISHO " , le KATANA et le WAKIZASHI .
Autrement dit , ceux montés en " BUKE ZUKURI " . Cette forme de monture qui demeure caractérisée par la présence sur le fourreau du " KURIKATA " c'est à dire cette pièce recevant le " SAGEO " , le cordon qui sert à attacher le sabre dans la ceinture et indique son port tranchant vers le haut .
Cependant nous n'omettrons pas pour autant les autres sabres et nous reviendrons brièvement toutefois en fin de chapitre sur les montures des TACHI ( nommée " JINDACHI ZUKURI " ) et des TANTO , qui possèdent leurs montures propres ainsi que sur certaines acceptations particulières telles le HANDACHI monté avec des pièces semblables au TACHI mais affublé cependant d'un KURIKATA qui le classe dans la famille des KATANA .
4.2 Les montures du KATANA et WAKIZASHI :
4.2.1 Les montures extérieures à la lame : Ce titre , autrement dit , désigne l'ensemble des pièces constituées par le fourreau ou SAYA et toutes celles s'y " accrochant " . A l'exception du SHIRASAYA ( voir ci-après ) , l'ensemble des montures " d'habillage " en quelque sorte , du sabre se nomme KOSHIRAE .
4.2.1.1 : Le fourreau : SAYA :
Les différents types de foureaux rencontrés qu'ils soit provisoires , tels le " SHIRASAYA " ou " fourreau dormant ou restant " , aussi nommé YASUME SAYA , destiné à recevoir la lame , en attente du fourreau définitif , appelé lui , SAYA , sont constitués de la même façon .
A la base, une coque de bois , en " HO ", c'est-à-dire en magnolia voire à défaut en aulne , est constituée , préparée , taillée et assemblée de la même façon quelque soit la finition qu'on lui intime . Cette confection étant largement détaillée au chapitre 6 , nous ne reviendrons pas dessus ici .
Occupons nous plutot du fourreau classique , c'est-à-dire décoré et laqué .
Ce laquage constitue en plus du collage au riz mentionné chapitre 6 , un excellent " consolidificateur " du fourreau car appliqué en plusieurs couches , il renforce le collage .Mais précisémment , qu'est ce laquage ?
- Son origine remonte à l'art chinois et est apparu sur les lames japonaises dès l'ère NARA .
Son intérêt , outre celui mentionné ci-avant , permet d'obtenir une surface lisse , glissant parfaitement dans le " obi " et offre également une protection parfaitement imperméable pour le fourreau .
Son fabricant ou SAYACHI , applique une laque provenant de la résine issue d'un arbre " URUSHI NOKI " dont la récolte s'effectue par scarification ( comme le caoutchouc ) . A la base , cette résine affecte une couleur tirant vert le jaune pâle . Par conséquent des colorants ou des composants ( fines ou fillers ) sont ajoutés pour obtenir diverses teintes .
L'ensemble de ces constituants sont étalés par couches , séchés puis polis pour donner différents aspects de surfaces imperméables et parfaitement résistants à la corrosion . Cependant comme la réaction favorisant le durcissement nécessite un environnement humide , seulement de fines couches de laque peuvent être durcies . Lorsque la solution laquée doit s'avérer plus épaisse , elle est réalisée en plusieurs applications , chacune devant sécher avant que la suivante ne soit effectuée .
La couleur la plus usuelle demeure certes le noir qui se prépare par adjonction de charbon de bois dans la laque liquide et également le vermillon qui nécessite lui l'apport de " cinabre ou vermillon " ( Le cinabre (α-HgS) est le minerai de mercure le plus répandu et exploité. Lors des derniers millénaires, le cinabre natif présent dans les gisements a été utilisé soit comme pigment, après extraction dans une veine pure, soit pour en extraire le mercure par décomposition thermique.
Le vermillon, de même formule chimique que le cinabre, est par contre un pigment minéral artificiel produit par synthèse, favorisé par un milieu alcalin) .
Bien sur , or , argent et autres particules ou paillettes métalliques peuvent être également utilisées pour décorer le fourreau de diverses manières .
La réalisation des techniques de mise en oeuvre de laque en multi-couches s"appelle WAKASA NURI . Certains fourreaux peuvent comporter jusqu' à 25 couches de laque .
Les principaux types de finitions à la disposition du SAYACHI sont les suivants :
- MAKIE : Littéralement : " image dispersée " . Ce sont des techniques de saupoudrage plus ou moins intensif d'or et d'argent ( surtout ) ainsi que des incrustations de motifs .
Le procédé est simple : on saupoudre ces particules sur une surface de laque collante , puis on laisse durcir et enfin soit on conserve le résultat tel quel , soit on le polit soit on applique une couche de laque transparente dite " d'après " .
Si l'on utilise beaucoup d'or , afin de " matiner d'or " la surface , on obtient un effet nommé IKAKEJI ou KINIIKAKEJI . Ceci traduit un rendu ayant subi un polissage doux , donnant l'aspect de l'or solide .
Si au contraire , on utilise moins d'or , on obtient un support tacheté , tavelé , nommé NASHIJI ( " peau de poire " ) ou KINNASHIJI .
On peut réaliser ce dernier effet sous forme de tâche ponctuelle , alors nommé MURA NASHIJI (" Tâche de poire ") .
Parsemer des " flocons " d'or et les recouvrir de couches de laque transparente peut conférer une similitude avec une nuit étoilée . Des perles ou d'autres coquillages ou leurs constituants telle la nacre ( " raden " ) peuvent également donner des effets identiques .Des motifs picturaux peuvent également être réalisés en utilisant des laques de couleurs différentes . Cela pouvant être réalisé sous la surface et ensuite révélé partiellement ou totalement par polissage , méthode appelée TOGIDASHI , ou bien par application de couches de profondeur variable par rapport à la surface finie . Il s'agit dans ce cas de superposer les différentes couches comportant tout ou partie des motifs désirés pour qu' à la dernière , celui-ci apparaisse terminé . En quelque sorte , les motifs sont sculptés et polis en 3 dimensions . Ce procédé s'avère globalement similaire à l' IROE ZOGAN utilisé pour les incrustations de montures de poignées notamment les TSUBA ( voir le paragraphe consacré à ce sujet plus bas dans ce chapitre ) et est appelé TAKA MAKIE ( " saupoudrage en haut relief " ) .
Il existe également une autre décoration consistant par un martelage de motif à l'aide " d'un emporte-pièce " , technique appelée KINNOSHITSUKI .
Certaines déclinaisons de ces méthodes peuvent être utilisées comme par exemple la technique dite " CHIRAKASHI MAKIE " qui consiste en une application d'un MAKIE très dispersé , sporadique .
On peut également découper des motifs dans des feuilles d'or , les incruster dans des couches de laque et les recouvrir de couches transparentes puis de polir l'ensemble . Cette technique se nomme HEIDATSU .
Horsmis ces techniques raffinées d'incrustation de particules métalliques plus ou moins riches , il exsite des types de finition et d'aspect des SAYA voire des incorporations de matériaux annexes comme notamment de la peau de raie ou de requin ( voire de galuchat ) sur le fourreau , que l'on nomme SAME NURI et plus généralement pour les fourreaux présentant cet aspect SAME SAYA .On peut également rencontrer la technique dite TSUISHU : C'est un type de laquage d'origine chinoise , dans lequel , une alternance de couches de laques colorées ( le plus souvent rouge et noir mais aussi quelquefois jaune et vert ) sont appliquées puis découpées suivant le tracé d'un motif souvent floral qui révèle les teintes des diverses couches de laques qui s'avère proche des techniques nippones précédentes .
GURI-BORI : Type de laquage de fourreau , aussi employé pour qualifié un type de gravage de montures extrêmement beau ressemblant au laquage traditionnel chinois appelé " tsuishu " .Nous avons parlé déjà des finitions polies , il existe aussi des finitions rugueuses , granuleuses de la couche de laque superficielle . On peut également mêler comme indiqué ci-avant de la peau de raie ( le best ) , polie ce qui rend parfaitement l'aspect granuleux de celle-ci et provoque un superbe motif décoratif , ensuite recouvert par la laque transparente . ( voyez en marge certains types de laquages proposés aujourd'hui ) .
Cas Particuliers :
- AOGAI : Type de laquage assez rare sur les lames japonaises .
- KUROURUSHI : Style de montures ( fourreau et voire tresses ) typique des période NARA à HEIAN présentant un aspect laqué noir uni et complet , arboré par les guerriers reconnus .
- YAKIURUSHI : Technique de laquage dans laquelle la laque est brulée sur le support , utilisée sur divers type de monture et notamment le fourreau ( dans le KUROURUSHI ) .
- YOZAKURA ou YOSAKURA : Trad." Cerise du soir " . Motif minuscule en laque ou en métal réalisé si discrètement qu'il ne peut être vu que sous l'effet d'un bon éclairage .
Quelques précisions supplémentaires , plutot relatives au SHIRASAYA :
- SAYAGAKI : Ce sont des informations écrites trouvées sur le fourreau ( SHIRASAYA ) . On emploie également le terme de HAKKO GAKI .
4.2.1.2 L'embout du fourreau ou KOJIRI : Cette pièce constitue le renfort d' extrêmité du fourreau . Cet élément est traditionnellement en bois mais il peut être réalisé avec des matériaux plus " recherchés " telle que de la corne .
Il peut être aussi , comme c' est régulièrement le cas , métallique , réminiscence des montures anciennes .
En effet , les TACHI arboraient des fourreaux affichant ce renfort métallique d'extrêmité nommé ICHIZUKI .
Alors que le ICHIZUKI est toujours placé sur le laquage , le KOJIRI peut être apparent ou caché sous le laquage . Cependant , si le matériau utilisé est noble , il sera bien évidemment apparent .
4.2.1.3 L'organe de fixation supplémentaire : ORIGANE ou SORITSUNE ou KAERIZUNO :
Tous ces termes désignent " l'appendice , l'ergot " qui figure sur le SAYA et qui s'avère être un crochet permettant de créer un second point de fixation pour le sabre dans le OBI . Ce second point d'accroche constitue donc un plus et une sécurité assurant le maintien du sabre en supplément du cordon , le SAGEO , sa présence sur le fourreau constitue donc une preuve de qualité .
4.2.1.4 L'organe de passage des cordons ou KURIKATA ( kurigata ) :
Littéralement KURIGATA veut dire : " forme de châtaigne " . Cet élément sert de passant pour le cordon ou SAGEO qui fixe le sabre à la ceinture .
Il est basiquement constitué de bois mais peut être , à l'égal du KOJIRI , en corne ( quand ce dernier l'est , celui-ci de même que la KOIGUCHI ( voir plus bas dans ce chapitre ) le sont également ) ou métallique .
Dans les sabres de qualité , les orifices de passage sont protégés de l'usure et l'érosion par des poncets métalliques quelquefois en métaux précieux nommés SHITODOME .
4.2.1.5 Le cordon de fixation du sabre ou SAGEO :
Le SAGEO est donc le cordon uni ou tressé servant à attacher le sabre dans la ou plutot les ceintures ( obi et hakama ) . Sa présence indique donc le port du sabre dans les obi , tranchant vers le haut , symbole du NUKI UCHI , et caractéristique des sabres appartenant aux KATANA et WAKIZASHI . Le terme français le désignant est quelquefois " dragonne " ( par analogie avec le cordon des sabres des dragons , anciens soldats français qui faisaient feu engardant le sabre dégainé à la main et donc attaché par cette courroie ) .
Son colori est souvent lié à celui des tresses figurant sur la poignée du sabre ( voir plus bas dans ce chapitre ).
Il peuvent être en coton ( moderne ) en fils de soie ( plus anciens ) , en fils d'or et d'argent ( plus anciens et plus luxueux ) et bien sur en mélange notamment soie-or-argent .
Une des particularités du SAGEO est la réalisation des noeuds , lorsqu'ils ne sont pas portés , qui sont toujours très spectaculaires et pas vraiment simples à réaliser . Les SAGEO modernes tressés en coton dit " mercerisé " peuvent atteindre 2 , 00 -2,10 m de long .
Voici quelques types de noeuds rencontrés :
- Cho Musubi :
- Daimyo Musubi : littéralement : " noeud des seigneurs " . C'est un noeud simple .
- Ronin Musubi : C'est un noeud double .
Petite précision :
TAKKO ASHI : Trad. " Tentacules de pieuvres " .
Ce sont les brins constituant les extrêmités divisées des SAGEO .
NB : Cas de l ' EBI ZAYA : C'est le nom donné au fourreau dont la finition des noeuds du SAGEO ou d' autres cordons fait penser à la queue du homard ou de la langouste . Exemple le cordon du TANTO , dans l' image ci-jointe :
4.2.1.6 L'embouchure du fourreau ou GUCHI , SAYAGUCHI ou KOIGUCHI :
Le terme générique pour embouchure ou bouche est " GUCHI " . " SAYAGUCHI " est le terme précis pour désigner l'embouchure du fourreau " SAYA " . " KOIGUCHI " est le terme communément utilisé pour désigner l'ouverture du fourreau . Il est en rapport avec la façon de positionner les doigts autour de cette ouverture pour le dégainement - rengainement , en position ovoide , semblable à une bouche de carpe (" KOI " ) , animal très répandu au JAPON .
Le terme technique lié au prédégainement confirme l'emploi de ce mot puisqu'il s'intitule " KOIGUCHI no KIRIKATA " , littéralement, " couper la bouche de carpe " .
Cette embouchure est fabriqué à partir de matériaux semblables au KOJIRI et KURIKATA . Lorsqu"elle est métallique , tirant cette origine des montures des TACHI anciens , elle se nommera KUCHIGANE ou encore GUCHIGANE .
Du point de vue pratique , la KOIGUCHI doit parfaitement être adaptée au HABAKI , le collier présent sur la lame ( voir plus bas dans ce chapitre ) et monté sur celle-ci après la forge et le polissage .
4.2.1.7 Les batardeaux et leur " rangement " :
A) le rangement ou ratelier : URAGAWARA :
Ce rangement figurant sur le fourreau consiste essentiellement en un creusement de celui-ci pile au format du batardeau et d'un cerclage métallique destiné au maintien de celui-ci .
L'évidement dans le bois du SAYA permettait au samourai de faire coulisser avec le pouce , dans ce " juste-au-corps " , le batardeau qui s'extirpait par une réservation prévue à cet effet dans la garde ( voir plus bas dans ce chapitre " ryo hitsu ") sans avoir à dégainer le sabre ce qui n'était pas toujours pratique ni souhaitable notamment en espace réduit ou avec de nombreuses personnes présentes ( voir en marge ) .
B) les batardeaux : les KODOGU : KOGAI et KOGATANA :
Ce terme KODOGU s'emploie pour les montures dites nobles qui sont au nombre de trois , KOGAI , KOGATANA et MENUKI
( dont nous traiterons un peu plus tard dans ce chapitre ) .
Ces trois montures lorsqu'elles existent toutes sont nommées " MITOKOROMONO " , littéralement " choses des 3 places " et si elles ne sont que deux " NITOKOROMONO " littéralement " choses des 2 places " .
Enfin si des 3 pièces étaient créées par le même artisan , on les appelait " SORIOMONO " ( après l'ère GENROKU au XVII ème siècle ).
Ces " KODOGU " symbolisaient comme tout le " KOSHIRAE " compris les autres montures dites " KANAGU " , le statut social de son propriétaire et apparurent surtout au XVI ème pour connaitre leur apogée au XVII-XVIII èmes siècles .
Ces montures sont généralement montées " en suite " , c'est-à-dire avec des motifs semblables ou des thèmes identiques .
De plus , l'emploi de métaux précieux étaient régulièrement courants ( or , argent , alliage avec ces métaux ) .Le KOGATANA , de KO , petit et GATANA pour KATANA . Ce petit katana donc était forgé avec de l'acier ayant également subi de multiples pliages et normalement trempé . Il était constitué d'une lame " HO " enfoncée dans une poignée , KOZUKA , de KO , petite et ZUKA pour TSUKA ( poignée ) . Cette petite poignée fait aujourd'hui le bonheur de nombreux collectionneurs grâce à ces magnifiques décorations en motifs précieux et délicats . Cette surface ornée , sculptée , ciselée et souvent signée se nomme JI ITA . ( la signature est une preuve de qualité ) .
- Le KOGATANA : C'est un petit couteau servant à divers usages domestiques : tailler des cure-dents , tailler les plumes servant à écrire ( activité prisée des samourai ) , tailler des baguettes . Il est traditionnellement sur le côté URA du sabre .- Le KOGAI : C'est une sorte de stylet , placé côté OMOTE du sabre , utilisé comme poinçon , épingle à cheveux ou encore en cure-oreilles . Il est d'usage moins " glorieux " que son acolyte précédent .
C) les dérivés des batardeaux :- WARIKOGAI : C'est un KOGAI à double lame .
- UMABARI : Petit couteau à simple ou double tranchant quelquefois joint au sabre à la place du KOGAI ou du KOGATANA . Il servait surtout pour l'entretien des chevaux .
- WARIBASHI : Ce sont des baguettes métalliques quelquefois ouvragées pouvant remplacer un des deux batardeaux
( KOGAI ou KOGATANA ) . C'est un ustensile assez rare .
4.2.1.8 La housse du katana ou BUKURO :
Le BUKURO n'est pas à proprement parler une monture mais c'est une pièce d'équipement qui sert à envelopper le sabre et le transporter quand on ne le porte pas ou lorsque l'on va l'offrir . Il est constitué de tissu , plus ou moins luxueux , en coton aujourd'hui voire en soie comme naguère . Les cordons utilisé pour fermer cette housse se nomment HIMO voire FUSA HIMO s'ils possèdent des " pompons " .
4.2.2 Les montures situées sur la lame : Nous rencontrerons dans ce paragraphe de nombreuses KANAMONO
( Littéralement " choses de métal " ) , terme génériques désignant toutes montures métalliques .
4.2.2.1 Le HABAKI : Cette monture , l'une des plus importantes " mécaniquement " du KATANA a fait l' objet d'un exposé détaillé au chapitre 6 sur sa confection et sa mise en place sur le sabre . Première monture réalisée après la forge et le polissage soit la construction du sabre , ce qui traduit bien son importance . Je ne reviendrai donc pas ici sur cette création . Par contre , nous allons revenir sur ses définition et son rôle :
C'est un manchon métallique enchassé ou serti , le plus souvent en métal doré ( cuivre basique ) , ou argenté ( laiton ) voire en métal plus précieux : doré . C'est de l'or ou de l'alliage à base d'or , de l'argent ou un alliage à base de ce métal . Les finitions détaillées au chapitre 6 sont multiples ( notamment à base de feuilles d'or et d'argent ) , de même que les aspects ( lisse-poli , martelé , rugueux , granuleux ...) . Cependant , les finitions de base pour conférer un minimum de cachet au HABAKI sont les coups de stylet , plus ou moins fins qu'il arbore , nommés NEKOGAKI , littéralement : " griffures de chat " .
Ses rôles :
- Il maintient la garde ( TSUBA ) et lui évite ainsi de glisser sur la lame .
- Il centre cette même lame dans le fourreau , lui évitant ainsi tout contact avec le bois constituant ce dernier et de ce fait avec ses éventuelles impuretés , qui pourraient s'avérer vecteur d'oxydation .
- Il bloque la lame dans la KOIGUCHI , lui évitant de tomber même en cas de port accidentel du fourreau à l'envers . C'est ce bloquage qui nécessite le prédégainement ou " KOIGUCHI NO KIRIKATA " du sabreur .
- Mécaniquement , il amortit les vibrations dues aux chocs résultant des coups portés ( voir parés ) évitant de ce fait l'excès de sollicitation de la garde et de la poignée qui pourraient se désolidariser voire se briser sous la puissance de l'impact .
La zone de la lame , voisine des MACHI et recouverte par cette monture , se nomme HABAKIMOTO .
A la longue , une rouille significative , nommée SABIGIWA , se forme en bordure du HABAKI et des traces de stylet ou YASURIME . Cette trace temporelle est très importante à observer lors de l'estimation d'une lame , en effet , ses " impressions " permettent d'établir assez clairement s'il s'agit d'un sabre ancien ou récent . Aussi , elle subit régulièrement et malhonnêtement des tentatives de vieillissements artificiels pour essayer de duper un acheteur sur l'âge du sabre .
Avant de présenter les montures indiquéesci-avant , une petite précision s'impose pour définir comment se nomme le trou figurant sur les montures suivantes . Un trou en japonais porte le terme générique de ANA .
La garde ou TSUBA , les SEPPA , le FUCHI ( voir ci-après ) sont toutes des montures qui viennent " s'enfiler " sur la lame et plus précisément sur le NAKAGO ( les soies ) . De ce fait , par analogie , le trou traversant ces montures se nomme donc NAKAGO ANA .
4.2.2.2 Les " joints " : SEPPA et les cales :SEKIGANE :
Les SEPPA : Ces pièces au nombre de 2 , ni plus , ni moins , figurent de chaque coté de la garde ou TSUBA et permettent de maintenir celle-ci parfaitement en place en évitant le " jeu " . La position qui lui est réservée sur cette garde porte le nom de SEPPA DAI . Ces espaceurs sont généralement en cuivre de base mais certains sabres luxueux vont jusqu'à présenter des SEPPA en métal précieux . On trouve généralement avec ces pièces des cales en cuivre rouge , les SEKIGANE , qui obstruent les interstices avec la TSUBA et qui sont écrasés lors du positionnement de la garde et des SEPPA . Leur nombre est variable en fonction de la nécessité lié au " jeu " entre les pièces .
Nous reviendrons plus tard sur la TSUBA , la garde , qui constitue une monture tout à fait spéciale , notamment depuis l'ère EDO , particulièrement choyée par les artisans et ouvragée de telle sorte que sa magnificence fait l'objet d'un vrai culte de la part de collectionneurs presqu'autant que le sabre lui-même . Sa surface offre un champ d'exercice de style plus important que les autres montures du fait de sa taille et de sa position préférentielle sur l'arme .
4.2.2.3 Le FUCHI , collier de maintien et le KASHIRA , le pommeau :
Ces deux montures si elles ne sont pas nobles sont souvent luxueuses et toujours en suite , souvent même avec la TSUBA bien que cela ne soit pas impératif .
Elles constituent les deux extrêmités de la poignée , TSUKA , et ont des rôles différents .
- Le FUCHI :
C'est une pièce " mécanique " assez importante du sabre ." Cette virole " , renforce la TSUKA en partie inférieure .
Elle est constituée d'un anneau ovoide " TONGA GANE " , soudé sur un méplat " TENJO GANE " , l'ensemble étant percé , comme on l'a vu et peut être signé .
- Le KASHIRA : aussi appelé TSUKA KASHIRA .
C' est le pommeau ( ou " talon de renfort " ) du sabre , il est percé d'un trou nommé ITO ANA , pour permettre le passage des tresses ou ITO voire TSUKA-ITO ( voir ci-après ) . Cet orifice est , surtout sur les montures luxueuses , renforcé de poncets semblables à ceux du KURIKATA nommés ITODOME et constitués de métaux plus ou moins précieux .
On notera le cas particulier du MAKI KAKE NO KASHIRA , KASHIRA en corne noire recouvert par les tresses du sabre , spécificité arborée par les daimyos à la cour des Shogun TOKUGAWA .
4.2.2.4 La poignée ou TSUKA :
Cette TSUKA est constituée d'une suite de composants , montures si l'on veut , qui réunies forment la poignée proprement dite .
Voici l'ensemble de ces composants :
- L'armature de la poignée d'abord : elle est constituée de 2 coques de bois souvent du HO ( magnolia ) , le même qui constitue la SAYA ou à défaut de l'aulne . Celles-ci viennent ceindre le NAKAGO sans entrer vraiment en contact avec lui . Elles sont percés d'un ou deux trous dans un sabre neuf , positionnés aux endroits du ou des MEKUGI ANA ( voir § sur le NAKAGO précédemment dans ce chapitre ) .
- Cette armature sert de support au " corps " de la poignée : Celui-ci est constitué de peau de raie dans un sabre traditionnel , remplacée quelquefois par de la peau de requin voire de galuchat ( poisson-chat ) pour les sabres de plus modeste qualité .
Cette peau de raie se nomme SAME ou SAMEKAWA et dans le passé , il était fréquent d'offrir ce présent dans un coffret comme marque d'estime ou de déférence et cela constituait un cadeau fort appréciable .
Cette raie est semblable à la raie Pastenague , sa peau contient de la silice , si bien qu'en séchant , elle durcit et présente un aspect granuleux . Esthétiquement , contrairement à bien des cas, où plus un produit est lisse , fermé , plus il est prisé , ici , c'est le contraire . Plus les grains sont gros , plus la poignée est adhérente aux mains du sabreur et donc la peau de raie est de qualité .
Cette peau peut se présenter de deux façon : Soit deux moitiés indépendantes disposées de chaque côté de la poignée nommée TANZAKU KISE soit une peau coupée en deux mais conservant une partie " charnière " et se repliant autour des coques de bois , nommée MAEDARE KISE . Celle-ci est également percé aux lieux et places des MEKUGI ANA .
Enfin elle peut être teinte et se présenter colorée , cependant le blanc original et le noir teint constituent l'essentiel des SAME .
- La fixation des pièces ci-dessus est ensuite assurée par enchâssement à l'aide d'une goupille conique , le MEKUGI . Celui-ci est traditionnellement en bambou , mais il peut être plus luxueux : chêne , corne , ivoire , os ou certain métal précieux . Il est enfoncé à l'aide d'un maillet depuis l'omote . En général , ils sont au nombre de 1 à 2 maximum sur un sabre neuf .
- Le recouvrement de la poignée se fait à l'aide des ITO ou ITO MAKI , les tresses ( ou encore soies ) dont la réalisation fait l'objet d'un véritable art : TSUKA MAKI .
Ils mesurent souvent près de 3,60 m et il vaut mieux être entrainer pour défaire une tresse d'un sabre et en entreprendre une nouvelle ( ou la même ) . Nous reviendrons un peu plus tard sur cet art particulier .
Ces tresses passent au travers du ITO ANA , la réservation dans le KASHIRA où elles se terminent et se nouent côté URA ou OMOTE , le noeud des tresses se nommant MAKIDOME , et les cordons composant ces tresses UCHI HIMO .
- Enfin la dernière monture appartenant à la poignée , que nous avons évoquée précédemment puisqu'elle appartient au KODOGU , ce sont les MENUKI . Ils sont au nombre de 2 , un côté OMOTE et un côté URA . Généralement très joliment décorés , en métaux plus ou moins précieux , ils sont souvent , lorsque les batardeaux constituant les autres KODOGU sont absents , en suite avec les FUCHI , KASHIRA et TSUBA .
Leur existence est avant tout décorative . Certains affirment qu 'ils possèdent un rôle actif en agissant comme " grip " pour le sabreur lors de la tenue de son arme . Cela reste cependant à prouver , car même si les motifs qui les ornent constituent effectivement un relief pouvant permettre une accroche lors de la préhension du sabre , celle-ci reste cependant limitée .
De plus , même si ces montures sont disposées de façon plus ou moins habiles sur la poignée , il ne semble pas qu'elles soient systématiquement et avec précision positionnées pour que l'utilisateur ait ses mains et ses doigts parfaitement en adéquation avec le relief du motif du MENUKI . Normalement , celui côté OMOTE , se trouve placé sous les doigts extérieurs et celui côté URA , dans le creux de la main .
Les MENUKI peuvent présenter divers visage sur la poignée : Apparents totalement ou plus ou moins partiellement dissimulés par le tressage , en fonction de la nature de celui-ci . A leur verso , ils présentent un petit piton qui contribue à assurer leur fixation par " plantage " dans la SAME .
- L'art du tressage ou TSUKA MAKI : Il existe plusieurs sorte de nom de tressage :
D'abord , ceux en relation avec la position des MENUKI :- Tressage à plat , dit HIRUMAKI , qui laisse les MENUKI apparents ( plutot typique des TACHI ) .
- Tressage juxtaposé , dit TABARAMAKI , qui laisse également les MENUKI apparents .
- Tressage double torsion , dit KIKKOGATAHISHI , qui laisse les MENUKI non-apparents .
Ensuite les tressages ( quelques uns ) en relation avec leur forme propre :
- HINERI MAKI : C'est un style basique dans lequel les deux cordons des tresses sont torsadés et pliés au croisement.
- TSUMAMI MAKI : C'est un style fantaisiste dans lequel les deux cordons des tresses sont " pincés " au croisement .
- HIRA MAKI : C'est un vieux style de Tachi , dans lequel les deux cordons des tresses restent plats au croisement .
- KATATE MAKI : C'est un style de " bataille " qui commence et se termine en HINERI MAKI et a un cordon enroulé autour de la TSUKA . Ce style est utilisé sur les anciens TACHI et KATANA et plus récement sur des SHINGUNTO de 1944 .
- KATAHINERI MAKI : Style fantaisiste alternant KATATE et HINERI MAKI .
- JABARA MAKI : Style de tressage très fin mélant croisement et fine superposition .
Il nous reste maintenant à nous intéresser à la dernière monture et non des moindres , la garde ou TSUBA , la plus
" éclatante " de toutes les KANAMONO . Tous les sabres traditionnels japonais , les NIPPON TO sont des TSUBAMONO , c'est-à-dire des armes possédant une TSUBA , mise à part certains TANTO mais qui ne sont pas de toutes façons des sabres .
Avant de nous étendre , le mot n'est pas vain , tant le sujet de la TSUBA est riche en informations , il convient de préciser un élément dont j'ai omis de parler mais qui est important , c'est le côté complètement démontable du sabre , lorsqu'il s'agit de la lame de celui-ci et de tout ce qui s'y trouve .
En effet , le sabre japonais ne nécessite aucun outil destructif pour dénuder sa lame .
Un chasse goupille , c'est normalement tout ce qu'il faut . Avec lui , on ôte le ou les MEKUGI , puis on tape la poignée plus ou moins fortement d'une main sur l'autre pour désolidariser les coques de bois formant la poignée du NAKAGO ( nul besoin d'ôter les tresses ) , puis on fait coulisser FUCHI , TSUBA et SEPPA autour du NAKAGO puis enfin, le HABAKI qui sera peut être la seule monture à nécessiter l'utilisation d'une pièce de bois et d'un maillet pour le " dessertir " de son logement et libérer la lame nue dans toute sa splendeur .
Suite
Chapitre 8 : Typologie Détaillée |
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